Le CETA contre l’intérêt général : publication du rapport “CETA : marchander la démocratie”

mercredi 21 septembre 2016, par AITEC

L’Accord économique et commercial global (dit CETA du fait de son acronyme anglais – Comprehensive Economic Trade Agreement) pourrait exposer les Etats membres de l’UE à des plaintes coûteuses de la part d’investisseurs nord-américains contestant des mesures d’intérêt général.

A la veille de la rencontre des ministres européens du commerce à Bratislava, où ils décideront du processus d’approbation du CETA par l’UE, l’AITEC, Attac France et Corporate Europe Observatory (CEO) publient, avec une vingtaine d’autres organisations de la société civile en Europe, le rapport “CETA : Marchander la démocratie”. Il démontre que le chapitre 8 du CETA, consacré à la libéralisation et à la protection de l’investissement, demeure une menace substantielle pour nos démocraties.

Une fois approuvé et ratifié, le CETA autoriserait les investisseurs canadiens, et leurs homologues américains disposant de filiales au Canada, à poursuivre les Etats membres de l’UE et l’UE elle-même pour toute législation affectant négativement leurs bénéfices. Le CETA ne comprend en revanche aucune obligation pour ces investisseurs.

Les accords de libre-échange existants tels que l’ALENA (Accord de libre-échange nord-américain) montrent que la majorité de telles poursuites incrimine des lois et  églementations protégeant la santé publique, l’environnement et le droit du travail, et permet aux intérêts lucratifs particuliers de supplanter l’intérêt général. Comme le souligne le rapport, le chapitre investissement du CETA conduirait à l’explosion des plaintes d’investisseurs contre des Etats. Ces plaintes sont tranchées dans des cours d’arbitrage sises hors des juridictions nationales ou européennes. Ce système de justice parallèle rend les procédures extrêmement coûteuses, opaques et partiales ; il alourdit par ailleurs les dépenses publiques et met la décision démocratique en péril.

Lora Verheecke, chercheuse et chargée de campagne chez CEO, observatoire des lobbies à Bruxelles, coordinatrice du rapport, souligne  : “Ce nouveau rapport passe en revue les promesses de la Commission européenne censées rassurer les citoyens sur l’innocuité du chapitre investissement du CETA. Mais en dépit des changements apportés aux dispositions du précédent chapitre, le CETA ne démontre toujours pas qu’il protégera les Etats membres et l’UE d’une pluie de plaintes de la part d’investisseurs estimant leurs espoirs de profits frustrés”.

Amélie Canonne, présidente de l’AITEC, complète :“Le système juridictionnel sur l’investissement ne présente aucune évolution significative qui permettra aux Etats de retrouver leurs capacités à légiférer et réglementer sans crainte d’être poursuivis. Les plaintes liées aux secteurs pétrole-gaz/mines/électricité sont de plus en plus nombreuses, et représentent déjà un tiers du total des poursuites. Cela signifie que les entreprises canadiennes qui sont leaders de l’extraction énergétique et minière dans le monde ne se priveront pas d’attaquer des politiques conçues pour lutter contre le changement climatique.

”Aurélie Trouvé, porte-parole d’Attac France, conclut : « Au nom de la protection de leurs investissements, les multinationales américaines et européennes pourront bien davantage imposer leurs desideratas aux citoyens : moins de normes environnementales, sanitaires et sociales pour plus de profits financiers. Cet énorme risque, qui a été mis en évidence dans le TAFTA, est bien présent dans le CETA. Voilà pourquoi, tout comme le TAFTA, il faut repousser le CETA. »
En dépit des mobilisations massives de l’opinion publique contre le traité, et notamment son chapitre investissement, les gouvernements de l’Union européenne et du Canada prévoient la signature de l’accord avant la fin de cette année. Des marches et des actions exigeant de renoncer au CETA sont organisées dans toute l’Europe dans le cadre de l’Automne d’action (lien).

En France et notamment à Paris, une initiative portée le Collectif Stop Tafta/Ceta aura lieu le samedi 15 octobre.

Vous pouvez télécharger le rapport en français ICI

En anglais ICI


Guerre fiscale à venir entre Washington et Bruxelles

Les Américains ne digèrent pas la décision européenne d’obliger Apple à rembourser 13 milliards d’euros au fisc irlandais et accusent Bruxelles de cibler les entreprises de leur pays. En déplacement à Washington ces lundi et mardi, la commissaire Margrethe Vestager a annoncé une enquête contre la société française Engie

Une provocation? Avant de débuter son entretien avec la presse américaine lundi à Washington, Margrethe Vestager, la commissaire européenne à la Concurrence, s’est amusée à photographier les journalistes avec son iPhone. Après quelques clics, elle a plaisanté, disant que son appareil n’était pas du dernier modèle; celui-ci n’est pas encore disponible en Europe. Le 20 août dernier, la «Dame de fer» avait condamné Apple à rembourser 13 milliards d’euros à l’Irlande, une somme représentant l’aide d’Etat illégale qu’elle a touché entre 2004 et 2014. La décision avait immédiatement déclenché une grande colère tant chez les autorités que chez le patronat américain.

En se déplaçant aux Etats-Unis ce début de semaine, Margrethe Vestager a voulu expliquer à ses détracteurs que la décision contre le géant technologique américain était justifiée sur le plan fiscal et qu’elle n’avait pas de dent particulière contre les entreprises américaines installées en Europe. Même si dans une interview accordée vendredi dernier à Euractiv, agence de presse spécialisée dans l’actualité européenne, elle a affirmé que deux autres entreprises américaines, McDonald et Amazon, étaient dans son champ de mire. Au lendemain de la décision annoncée contre Apple, son directeur Tim Cooks avait dénoncé un «procès politique». Le secrétaire au Trésor Jacob Lew s’est exprimé dans les colonnes du «Wall Street Journal» où il a qualifié la décision européenne de «mal inspirée et mauvaise pour les investissements en Europe».

Hache de guerre déterrée

Les patrons américains ont aussi déterré la hache de guerre. Dans une lettre qu’ils viennent d’adresser aux vingt-huit chefs d’État et de gouvernement, ils leur demandent de renverser la décision prise par la commissaire européenne à la Concurrence. «Ce précédent augmenterait l’incertitude avec un effet néfaste sur les investissements étrangers en Europe, menacent-ils. L’Union européenne vient de s’auto-infliger une blessure douloureuse.»

En conclusion, Business Roundtable, l’organisation faîtière, appelle les dirigeants politiques nationaux à assurer eux-mêmes leur souveraineté fiscale. Le cas échéant, selon eux, cela poserait des questions sur leur capacité à conclure des conventions et à en honorer les engagements. Certains patrons ont demandé à Washington de prendre des mesures de rétorsion contre les entreprises européennes établies aux Etats-Unis.

Pas la même vision

Margrethe Vestager n’est toutefois pas allée aux Etats-Unis sans armes. «Il est 100% légitime d’imposer les bénéfices là où ils sont générés, a-t-elle dit dans une interview publiée à la veille de son départ dans le journal allemand «Handelsblatt». De notre point de vue, il est absolument irritant de constater que les multinationales américaines paient moins d’impôts que les entreprises européennes.» Face aux journalistes américains lundi, elle a nié toute idée de discrimination envers les entreprises américaines. «L’Union européenne est ouverte pour les affaires et non pour l’évasion fiscale, a-t-elle déclaré. Nous avons une histoire différente des Etats-Unis et n’avons pas toujours la même vision des choses.»

C’est devant son auditoire américaine que «Madame Concurrence» européenne a annoncé l’ouverture d’une enquête approfondie sur les rescrits fiscaux (tax rulings) consentis par le Luxembourg à Engie (anciennement GDF Suez). La Commission estime que la multinationale française a bénéficié des dérogations fiscales de façon sélective.


L’Europe d’un visionnaire ?


Contre l’espionnage, Julian Assange recommande d’utiliser La Poste

« Les journalistes sont traités par les services de renseignements comme des espions », affirme le fondateur de WikiLeaks dans le quotidien belge « Le Soir ».

Source AFP

Publié le 24/10/2015 à 15:13 | Le Point.fr
Le fondateur de WikiLeaks, Julian Assange, met en garde les journalistes contre les services de renseignements.
Le fondateur de WikiLeaks, Julian Assange, met en garde les journalistes contre les services de renseignements.©Juan Passarelli/AP/SIPA

Europe : Big Brother isn’t watching you

L’Union européenne a osé l’impensable, résister aux États-Unis !

Et pas dans n’importe quel domaine, mais dans celui qui est au cœur de la souveraineté étatique, celui de la « sécurité nationale ».

La Cour de justice européenne a, en effet, jugé, le 6 octobre dernier, dans une affaire opposant un citoyen autrichien à Facebook, que les entreprises américaines ne pouvaient pas transmettre les données personnelles des Européens vers les États-Unis, celles-ci n’y bénéficiant d’aucune protection réelle, ce qui porte « atteinte au contenu essentiel du droit fondamental au respect de la vie privée » et à l’État de droit. Tous les accords trouvés avec les États-Unis depuis 15 ans s’effondrent donc d’un coup : non seulement Facebook, Google, Apple, Amazon et autres géants américains ne pourront plus transmettre de données vers le territoire américain, mais c’est aussi vrai pour les compagnies aériennes (PNR, passenger name record ou « données des dossiers passagers ») ou encore les banques européennes (réseau Swift) .

Ce qu’a fait la Cour, aucun État membre n’a osé le faire vu les implications diplomatiques et économiques. Bien au contraire : depuis 2000, ils ont toujours cédé face aux exigences de plus en plus grandes des Américains en matière de transfert de données personnelles, alors que, au nom de leur doctrine extensive de sécurité nationale, ils refusent de respecter la vie privée du reste du monde (celle aussi des Américains depuis le Patriot Act, mais cela, c’est leur affaire). Pis : l’affaire Snowden a montré que les États-Unis, en matière de collecte de données, ne s’embarrassaient pas des normes inhérentes à l’État de droit. La Commission et le Parlement européen, largement soumis à l’influence des gouvernements de l’Union, ne se sont pas montrés plus exigeants, se contentant des protestations de bonne foi des autorités américaines. Il faut dire que les États-Unis n’ont pas hésité à menacer les Européens de mesures de rétorsion s’ils se montraient un peu trop regardants, par exemple en interdisant aux compagnies aériennes européennes qui ne transmettraient pas les données personnelles de leurs passagers d’avoir accès à leur territoire… Certes, les Européens pourraient faire de même, mais l’Union n’est pas une fédération achevée et les États, qui gardent l’essentiel de leurs prérogatives souveraines, contrairement à une légende tenace, ont eu trop peur d’être ciblés individuellement par les Américains pour entrer dans un tel bras de fer. La Commission et le Parlement n’ont fait que prendre acte de ce rapport de force.

Néanmoins, pour rassurer les citoyens inquiets, la Commission a créé un cadre juridique, en 2000, censé offrir une protection équivalente à celle qui existe dans l’Union pour les données transmises aux États-Unis. C’est le fameux safe harbor ou « sphère de sécurité », une sorte de code de bonne conduite reposant, comme le dit la Cour de Luxembourg, « sur l’autoévaluation et l’autocertification » des entreprises américaines, censé garantir, notamment, un droit d’accès et de rectification aux citoyens européens. C’est ce safe harbor que la Cour a démoli : pour elle, il s’agit d’une coquille vide, ce qui ne constitue pas vraiment une surprise. Elle souligne ainsi qu’il « est uniquement applicable aux entreprises américaines qui y souscrivent, sans que les autorités publiques des États-Unis y soient elles-mêmes soumises. En outre, les exigences relatives à la sécurité nationale, à l’intérêt public et au respect des lois des États-Unis l’emportent sur le régime de la sphère de sécurité,  si bien que les entreprises américaines sont tenues d’écarter, sans limitation, les règles de protection prévues par ce régime, lorsqu’elles entrent en conflit avec de telles  exigences ».

En clair, les autorités américaines peuvent se servir librement, sans aucun principe de proportionnalité, dans les serveurs des entreprises sans avoir à respecter les droits fondamentaux de la personne. En effet, les citoyens européens n’ont aucun droit d’accès, de rectification, de suppression des données les concernant et qui sont traitées par les autorités américaines. De même, ils ne disposent d’aucune voie de recours judiciaire, ce qui les prive « du droit fondamental à une protection juridictionnelle effective, une telle possibilité étant inhérente à l’existence d’un État de droit ». Pour la Cour, la « sphère de sécurité » n’offre donc absolument pas un « niveau de protection équivalent » à celui qui existe dans l’Union. Mieux : la Cour estime que le constat par la Commission de l’existence d’un niveau de protection des données équivalent ne prive nullement les autorités nationales de protection des données (comme la CNIL en France) de leur pouvoir de contrôler au cas par cas qu’il est bien appliqué. Autrement dit, la protection dont bénéficient les citoyens européens est triple : par la Commission, par la Cour de justice qui contrôle la Commission et par les autorités nationales qui s’assurent que dans chaque cas les droits des Européens sont protégés.

La Commission et les États membres ont donc reçu un véritable coup de massue de la part du juge européen. C’est toute la beauté du système communautaire : il peut se montrer plus grand que la somme des États et des intérêts nationaux. « La Cour de justice a pallié la défaillance du législateur », estime Nathalie Martial-Braz, professeure de droit privé à l’université de Bourgogne-Franche-Comté et spécialiste du droit numérique.

« En l’absence de texte, elle assure elle-même la protection nécessaire », ajoute-t-elle. La Cour a fait exactement la même chose, le 13 mai 2014, dans l’affaire Google Espagne, en consacrant le droit à l’oubli numérique et en mettant fin au régime d’irresponsabilité organisé par les géants américains (cela s’applique aussi à Wikipédia, organisme  sans but lucratif).

Les conséquences de l’arrêt Facebook sont énormes, tant d’un point de vue diplomatique – d’où la gêne à peine dissimulée de la Commission qui se retrouve avec une grenade dégoupillée entre les mains en pleine négociation du traité transatlantique (TTIP) –, qu’économique : « Tous les transferts de données personnelles vers les États-Unis sont désormais invalides », souligne Nathalie Martial-Braz. Certes, les entreprises peuvent encore utiliser des clauses contractuelles entre elles (les BCR), mais elles devront être validées par les autorités nationales de régulation, ou encore demander le consentement express de chaque personne… Ce qui s’annonce complexe, quand on sait que 95 % des données passent par le safe harbor.

Pour Nathalie Martial-Braz, « les entreprises sont prises dans un étau : soit elles arrêtent de transférer des données et elles s’exposent à des sanctions américaines, soit elles continuent et elles s’exposent à des sanctions européennes ». Et là, on touche du doigt les limites du droit européen et des différents droits nationaux : les sanctions pécuniaires restent, contrairement à ce qui se passe aux États-Unis, largement symboliques en Europe. En clair, cela devrait conduire les entreprises à… ignorer l’arrêt de la Cour de justice, car cela leur coûtera infiniment moins cher. Le seul moyen de résister au rouleau compresseur américain serait donc que le législateur européen instaure des sanctions à la hauteur de l’enjeu, sauf à rendre symbolique la protection offerte par le droit européen. Autrement dit, dans l’affaire Facebook, l’Union a fait la démonstration de sa raison d’être. Mais la Commission et les États peuvent parfaitement faire la démonstration inverse en privant de griffes et dents les juges européens. Avec le risque d’accroître l’euroscepticisme, car c’est « l’Europe » qui sera rendue responsable de cette incapacité à agir. Et non les États membres.


Opération déminage pour rassurer sur le TTIP

Opération déminage.

Face à la fronde croissante à laquelle se heurte le projet d’accord de libre-échange entre l’UE et les Etats-Unis (le TTIP), la commissaire européenne au Commerce, Cecilia Malmström, a tenté ce mercredi de calmer le jeu devant le Parlement européen.

La Suédoise y a présenté les lignes de force de son projet visant à réformer le mécanisme de règlement des différends entre investisseurs et Etats (ISDS). Cette clause, qui permet à des entreprises s’estimant lésées de poursuivre un gouvernement devant une instance d’arbitrage privée plutôt qu’une cour de justice nationale, constitue assurément LE chiffon rouge aux yeux des opposants au TTIP. Les détracteurs de l’ISDS estiment en effet que ce mécanisme permet à des investisseurs privés de remettre en cause des réglementations nationales d’intérêt public défavorables à leur business.

Certains eurodéputés veulent voir ce principe d’arbitrage, exigé par les Etats-Unis, totalement banni de l’accord transatlantique, si celui-ci voit le jour. D’autres, plus souples, sont ouverts à l’idée d’un système révisé.

Rappelant que les Etats membres de l’UE ont inclu à 1 400 reprises des clauses d’arbitrage similaires dans le cadre d’accords commerciaux bilatéraux, Mme Malmström reconnaît que les lacunes des systèmes existants exigeaient une vraie réforme pour « mettre fin au scepticisme et aux inquiétudes face à ce qui s’est produit dans le passé ».

Des gages insuffisants

A cette fin, elle propose d’inclure dans les textes une clause stipulant sans ambiguïté « le droit souverain d’un gouvernement de réglementer et protéger ses citoyens ». La commissaire se dit également favorable à la désignation d’une liste limitée d’arbitres, sélectionnés sur base de certains critères de compétences et opérant sur base d’un code de conduite plus proche de celui des tribunaux traditionnels. Le système actuel fait pour sa part appel, au cas par cas, à des avocats d’affaires choisis par les parties en cause. Cecilia Malmström suggère encore de mettre en place un mécanisme d’appel, inexistant à ce jour, et d’aller à plus long terme vers la création d’une véritable cour internationale permanente, composée de magistrats chargés de trancher les litiges en matière d’investissements.

Une politique de la main tendue qui a reçu un accord mitigé. Dans les rangs du groupe social-démocrate – dont le vote pourrait être déterminant lors de la séance plénière du mois de juin -, on souligne que si cette proposition constitue un progrès, elle ne va pas suffisamment loin. Plus durs, les Verts n’y voient qu’une tentative d’« enfumage ».

Le sujet sera au menu des ministres du Commerce réunis ce jeudi à Bruxelles.

Merci à Gilles Toussaint


La Ville de Genève organise une séance d’information sur l’accord Tisa

La Ville de Genève organise une séance d‘information sur l’accord Tisa
Les intervenants de cette soirée seront les suivants :
  • Isolda Agazzi, responsable de politique de développement chez  Alliance sud,
  • Stefan Giger, secrétaire général du Syndicat des services publics (SSP-VPOD),
  • Monsieur l’Ambassadeur Winzap, représentant du Secrétariat d’Etat à l’économie (SECO),
  • avec la participation de Mme Sandrine Salerno, conseillère administrative de la Ville de Genève, comme modératrice.

le mardi 26 mai dès 18h00 au Palais Eynard.


Le TAFTA dans notre assiette – Exemples de différences règlementaires entre l’UE et Les Etats-Unis


L’anarchie est de retour

L’Histoire nous joue des tours. Elle fait croire aux hommes que leur destin est un long fleuve tranquille, une route sans embûche, que chaque chose est une pierre ajoutée à l’édifice du progrès.


L’influence américaine dans le dispositif européen du TTIP

Depuis juillet 2013, l’Union Européenne (UE) a entamé des négociations avec les Etats-Unis (USA) afin de conclure un accord commercial de libre-échange entre l’UE et les USA en 2015. Cet accord, baptisé « Transatlantic Trade and Investment Partnership »  (TTIP soit « Partenariat transatlantique de commerce et d’investissement ») a donc pour objectifs de réduire, voire supprimer les droits de douane, d’uniformiser les réglementations de part et d’autres de l’Océan atlantique, d’ouvrir les marchés pour les services, l’investissement et les marchés publics et de mettre en place un mécanisme de règlements des différents entre entreprises et Etats.
Les différents éléments du mandat de négociations n’ont été diffusés que tardivement (9 octobre 2014) et partiellement. De façon générale, ces négociations restent opaques pour la plupart des élus des États membres et du grand public, contrairement à ce qui a été affirmé récemment par la Commission européenne, alors même que ce Traité engagera la vie économique et sociale de millions d’européens à long terme.
Les enjeux de ce traité pour les Etats membres de l’UE nécessite débat démocratique et transparence à tous les niveaux. Or le constat est que ni l’un ni l’autre n’existent.
Une réelle démarche de transparence serait en premier lieu de permettre au grand public de savoir qui sont les négociateurs mandatés par l’UE pour mener les négociations.

1-Une équipe de négociateurs européens sous influence?

a. Qui est M. Ignacio Garcia Bercero négociateur en chef européen pour le TTIP ? Son curriculum vitae est introuvable. Qui peut croire que cet homme est sans passé ? D’où vient-il, qu’elles ont été ses précédents postes  et missions ?
b. Quant aux autres membres de la délégation, certains d’entre eux ont travaillé dans des instances internationales fortement orientées pour la défense d’une certaine forme de modèle de libre-échange, le libéralisme économique, et l’ouverture des marchés (OMC, FMI, banque mondiale) tandis que d’autres ont réalisé leurs études aux États-Unis (Université de Berkeley, Harvad Business School…)

2-Une étude aux arguments orientés ?
L’Union européenne justifie l’importance et l’intérêt du TTIP par les résultats d’une étude qu’elle présente comme « indépendante » et qui lui sert de référence dans le cadre des négociations. Cette étude intitulée « Reducing transatlantic barriers to trade and investment : an economic assessment » (mars 2013) a été réalisée par le Centre for Economic Policy Research (CEPR).
Au-delà des résultats issus de cette étude, on peut réellement contester l’indépendance et la neutralité des dirigeants du CEPR et des auteurs de ce rapport puisque, en effet ils ont, dans le passé, occupé des fonctions en lien direct avec les intérêts économiques américains. Ainsi :

a. Richard Baldwin qui occupe depuis janvier 2014 le poste de Directeur du CEPR. était directeur des études sur les politiques publiques (Policy Director) au moment où l’étude a été réalisée. Professeur d’économie réputé, il a occupé différents postes en Europe et aux Etats-Unis. Jusqu’en 1991, année où il est arrivé en Europe, il était conseiller auprès du Président américain Bush sur les questions économiques (Senior Staff Economist for the President’s Council of Economic Advisors in the Bush Administration). A ce titre il a participé aux négociations de plusieurs accords de coopération économique : Uruguay Round, NAFTA, US-Japan Structural Impediments Initiative, et US-Japan Semiconductor Agreement. Richard Baldwin a donc défendu les intérêts économiques américains par le passé.

Lors de la négociation relative au traité NAFTA, des arguments basés sur des modèles économiques promettaient de la croissance et des créations d’emplois aux États-Unis ainsi qu’au Mexique. Ces prévisions ne se sont pas concrétisées. Selon l’étude « Heading South U.S.-Mexico trade andjob displacement after NAFTA » datant de 2011 et réalisée par l’Economic Policy Institute, au cours de la période 1993-1999, les Etats-Unis et le Mexique ont perdu plusieurs centaines de milliers d’emplois. En outre, les inégalités de revenus ont augmenté et l’impact sur les salaires a été négatif. La fiabilité des prévisions issues des modèles macro-économiques qui ne rendent pas compte de la complexité du monde actuel, parait donc douteuse.

b. Guillermo de la Dehesa, également président du CEPR et économiste réputé, a occupé au cours de sa carrière divers postes dans le gouvernement espagnol, à la Banque d’Espagne mais aussi à la Banque Mondiale. Il a par ailleurs travaillé dans le secteur privé, notamment bancaire. Il a été également conseiller international de la banque américaine Goldman Sachs. Enfin Guillermo de la Dehesa est membre du « Group of Thirty », ou G30, think tank basé à Washington. Ce G30 a été fondé en 1978 à l’initiative de la fondation Rockefeller qui a également fourni les premiers fonds. Son premier président a été Johannes Witteveen, un ancien directeur du Fonds Monétaire International. Son président actuel est Paul Volcker. Le G30 regroupe des financiers importants et des universitaires qui cherchent à approfondir la compréhension des problèmes économiques et financiers ainsi qu’à examiner les conséquences des décisions des secteurs publics et privés relatives à ces sujets.

c. Joseph François directeur de l’étude dite « indépedante » du CPER,  a été pendant longtemps en poste aux Etats-Unis en tant qu’économiste au Bureau des statistiques du travail (Bureau of Labor Statistics )(1983-1987) et directeur du bureau « économie » de la commission du commerce international (1991-1993). Cette commission est une agence fédérale qui défend les intérêts des entreprises américaines dans le cadre de plaintes pour contrefaçon, d’instruction de concurrence déloyale, de viol des barrières douanières de la part d’entreprises étrangères. Elle fournit également des études sur le commerce et la compétitivité au congrès et au Président américains.

En conclusion et en l’état actuel des informations disponibles, tout citoyen européen peut légitimement se poser la question de la capacité de l’équipe de négociateurs européens à défendre les intérêts de l’UE dans les négociations menées pour conclure le TTIP. Manifestement, ce dispositif ne permet pas de négocier à armes égales avec les États-Unis. La communication affichée n’atténue pas l’opacité caractéristique des négociations de ce traité, on ne lève pas l’opacité par des effets de communication.

http://www.infoguerre.fr/


Europe : d’une crise utile et du projet d’accord transatlantique (TAFTA)…

Entre crise politique européenne (constitution Commission Européenne) et négociation du traité transatlantique…A quelque chose malheur est bon !

Ancien premier ministre d’un petit pays européen connu pour ses services financiers ouverts à (presque) toutes finances, le luxembourgeois Jean-Claude JUNCKER, politicien depuis sa prime période estudiantine, continue de nous surprendre. L’homme n’était assurément pas le premier des favoris de l’Allemagne, ni de la Grande-Bretagne et de la France. Reconnaissons d’abord sa capacité à pratiquer le billard à 5 bandes. Puis à surprendre pour la proposition dans la composition de la Commission avec une stratégie de communication puissante et intelligente.

Ainsi, la presse européenne a repris l’idée d’une commission « la plus politique » de l’histoire européenne. Il est vrai que l’exemplaire premier ministre finlandais Jiyrki Katainen (43 ans) décidant de démissionner de son poste national (pour celui de Vice-président de la Commission) montre le formidable décalage entre certains pays nordiques (et de l’est européen) et d’autres pays occidentaux qui considèrent encore Bruxelles comme un job de compensation fut-t-il tenu par un ou une individu intellectuellement brillant(e).

Complète ce tableau d’une « Commission politique » plusieurs ministres actuels ou anciens ministres (Danemark, Pays-Bas, France, Italie, Lettonie, Slovénie, Grèce, Pologne, Espagne, Malte, Irlande, Lituanie, Hongrie, Autriche).

Cet effet « politique » a été fortement compensé par la répartition manifestement à contre-emploi de plusieurs responsabilités. Certains y ont vu un peu rapidement une stratégie de très haut niveau. L’avenir proche nous dira si les propositions de Jean-Claude JUNCKER sont flamboyantes ou si elles s’écraseront par les auditions en cours et les contradictions (et décisions urgentes) des dits commissaires proposés par les gouvernements nationaux.

Car il y a un formidable culot à solliciter un anglais, Jonathan Hill, 54 ans, ardent supporter de la libéralisation complète (ou presque) des services financiers à la « stabilité financière » et à ces mêmes services qui font la force de la place boursière de Londres. L’image du renard dans la basse-cour correspond parfaitement à cette nomination. Mais ce contre-emploi éblouissant n’est-il pas une stratégie politique destinée à pousser le Royaume-Uni à choisir enfin (et définitivement) la construction européenne comme avenir indépassable devant la montée d’UKIP ? Probablement !

Accorder au grec Dimitris Avramopoulos, 61 ans, les dossiers de l’immigration et des affaires intérieures est aussi surprenant quand on connait les réticences et carences de ce pays dans ce domaine et la gestion catastrophique des migrations.

Quant à l’Espagnol Miguel Arias Cañete, 64 ans, promu responsable climat et énergie, accusé de conflit d’intérêt avec l’industrie pétrolière, son cheminement sera semé de doutes persistants s’il est confirmé dans ce dossier. C’est lui qui n’a pas hésité à réduire les subventions aux énergies renouvelables dans son pays.

Le Hongrois Tibor Navracsics, 48 ans, en charge de l’éducation, culture, jeunesse et citoyenneté, a réussi à gagner l’unanimité …contre lui. La proposition de Jean-Claude JUNCKER porte assurément la marque du défi puisque l’homme de Budapest devra, s’il souhaite poursuivre dans sa candidature « à la citoyenneté », dénoncer les atteintes contre la liberté de la presse dans son pays. Avaler ses principes politiques conservateurs pour cet affidé de Viktor ORBAN sera un très mauvais moment. Sa réponse écrite du 6 octobre en complément de son audition par la commission du parlement européen n’a pas convaincu en ce qui concerne son appréciation de la « citoyenneté ». Ce sujet pourrait être supprimé de son portefeuille compte-tenu de son analyse personnelle sur les libertés citoyennes et leur évolution en Hongrie.

Dans l’épreuve de force actuelle au Parlement Européen, Pierre MOSCOVICI parait en difficulté même s’il serait étonnant que sa candidature soit, au final, rejetée. Pour autant, sans parler de « Mosco bashing », les questions soumises à l’ancien ministre français en charge des finances de son pays sont logiquement caustiques. En témoigne celle d’une député libérale néerlandaise qui l’interroge sur la capacité à passer du braconnier au garde-chasse ! En outre, l’actualité de l’annonce par la France d’un déficit prévisionnel envisagé à 4,3% du PIB (au lieu de 3%) tombe fort mal pour le socialiste français. Mais dans le cas de l’éjection du candidat espagnol et de la remise en question du britannique, Moscovici pourrait être dans la balance du côté des indésirables.

Côté analyse économique et sociale des différents(es) candidats(es), on remarquera une Commission ancrée à droite de l’échiquier politique sans surprise puisque correspondante aux votes des citoyens aux récentes élections.

Il y aurait donc 14 conservateurs du PPE, 4 libéraux, 1 conservateur britannique, 12 sociaux-démocrates. Et parmi ces derniers, plusieurs ont adoptés le politiquement correct de l’austérité budgétaire avec plus ou moins de souplesse (sic).

Jean-Claude JUNCKER n’a pas hésité à proposer au commissaire letton, maitre en libéralisme financier dans son pays qui grâce (ou à cause de) à lui a connut une période d’austérité budgétaire plus violente que la Grèce. On se posera la question de la contradiction persistante à vouloir lui confier la gestion de l’euro et le …dialogue social ! D’autant plus que ce petit pays s’est opposé à un projet de directive européenne pour renforcer les contrôles des travailleurs détachés qui produisent concrètement du dumping social. Provocation ou humour douteux, les salariés et leurs syndicats n’hésiteront pas très longtemps pour apprécier à sa juste valeur ce positionnement réactionnaire.

La libérale suédoise est dans son emploi avec le portefeuille du commerce puisque son pays est le plus favorable à la conclusion du traité commercial transatlantique.

Le commissaire irlandais en charge de l’agriculture a montré son intérêt pour l’agriculture OGM et son relatif dédain aux cultures bio. Pas vraiment dans le sens du mieux-manger demain mais complètement intégré par les milieux de l’industrie agro-alimentaire !

Sur Karmenu Vella (Malte) commissaire à l’environnement, aux affaires maritimes et à la pêche, on pourra souligner que Malte a une longue tradition d’accueil d’armateurs pratiquant le dumping social comme pour favoriser l’attractivité fiscale pour le patronat.

Quant au Vice-président finlandais en charge de « veiller » à la bonne tenue du commissaire Moscovici, il aura la responsabilité des stratégies budgétaires et de la relance alors que son ADN personnelle le pousse naturellement à adopter la posture d’Arpagon ! Moscovici sera donc chargé de maitriser les dépenses voire de les réduire, alors que le finlandais aura la clé de la cassette de la « Relance » (300 milliards d’euros prévus). Du bel art politique pour neutraliser l’un et l’autre !

Difficile de voir de l’innovation dans la conduite des affaires économiques. Deux vice-présidents thuriféraires de l’orthodoxie libérale budgétaire coifferont le commissaire Moscovici, ce qui pourrait être source de divergences conflictuelles qui seront arbitré par le Président Juncker.

Ces auditions de parlementaires portent toutefois une évolution positive de l’institution parlementaire européenne. Les députés assument leur nouveau rôle tout en restant dans l’organisation classique des rapports de force politiques. Ainsi, remettre en cause un candidat conservateur, même si cela est parfaitement justifié, provoque une réaction inverse de représailles contre un(e) candidat(e) social-démocrate. En cela, l’alliance habituelle entre les deux grands groupes politiques « socialiste » (SD) et « conservateurs/chrétiens-démocrates » (PPE) connait quelque remous durant cette période de sélection des futurs commissaires. On remarquera aussi que certains eurodéputés socialistes et verts ne suivent plus toujours les recommandations de leur groupe considérant inacceptable au niveau de leurs valeurs politiques un ou plusieurs futurs commissaires dont certains ne semblent pas apporter toutes les garanties contre les conflits d’intérêts actuels et futurs.

Au final, malgré la création de 7 postes de Vice-présidents, et une répartition donnant plus de place à l’Est de l’Europe (toute chose égale par ailleurs), remarquons la continuité politique plutôt qu’un véritable changement dans la politique de la Commission.

Enfin, un très mauvais signal vient d’intervenir pour ces derniers jours de la Commission Barroso, qui décidément de recevra pas d’hommage particulier des citoyens progressistes de l’U.E.

La Commission a rejeté le 11 septembre dernier, une proposition d’Initiative Citoyenne Européenne (I.C.E.) prévue suite à la conclusion du dernier Traité de Lisbonne.

Juridiquement, la technocratie bruxelloise considère qu’un mandat de négociation d’un traité commercial n’est pas un acte légal de l’Union, et qu’il ne peut être contesté, à ce titre, par une Initiative citoyenne européenne. Si cette décision était confirmée et non contestée, cela signifierait qu’il n’y aurait que peu de place pour ce type d’Initiative porté par l’espoir de redonner une voix aux citoyens européens. La Commission sortante est particulièrement attachée au tribunal arbitral qui permet une grande confidentialité notamment dans le cadre du projet accord transatlantique. On ne pourra s’empêcher de faire le parallèle avec l’affaire Tapie en France. Or l’opacité revendiquée par le monde des affaires et des conservateurs est inacceptable pour les salariés et les associations citoyennes.

Sur ce point essentiel, l’arrivée de la Commission Junker pourrait peut-être changer la donne de façon positive. En effet, le futur président a déclaré le 15 juillet dernier dans son discours d’investiture au Parlement à Strasbourg, s’engager à « ne pas accepter » que « la juridiction des tribunaux des États membres de l’UE soit limitée par des régimes spéciaux applicables aux litiges entre investisseurs. L’État de droit et le principe d’égalité devant la loi doivent s’appliquer aussi dans ce contexte ». Avec syndicats et associations, Jean-Claude Junker a marqué des convergences sur les risques que « les normes européennes de sécurité, de santé, les normes sociales, les normes de protection des données ou notre diversité culturelle » soient « sacrifiées » sur « l’autel du libre-échange ».

L’Allemagne opposée au tribunal arbitral n’a pas fini d’apporter sa marque au sein de la Commission malgré l’absence d’un poste de Vice-président (comme le second pays, la France).

Deux faits qui prouvent que nous pouvons aussi (parfois) être satisfaits de prises de positions qui nous ramènent aux préoccupations des citoyens(nes) européens. Ces derniers souffrent de la remise en cause des systèmes de protection sociale et de promotion concrète du développement durable sur notre continent.

Rémi AUFRERE

Nouvelle Commission (sous réserve approbation Parlement 23 octobre 2014)

Président : Jean-Claude JUNCKER

Sept postes de vice-présidents

 Frans Timmermans (Pays-Bas), Premier vice-président

 Kristalina Georgieva (Bulgarie), vice-président du Budget et des ressources humaines

 Alenka Bratusek (Slovénie), vice-président de l’Énergie

 Jyrki Katainen (Finlande), vice-président de l’Emploi et la Croissance

 Valdis Dombrovskis (Lettonie), vice président du Dialogue social

 Andrus Ansip (Estonie), vice-président du marché du Digital

 Frederica Mogherini (Italie), haute représentante pour les Affaires étrangères

Vingt commissaires

 Vera Jourova (République tchèque), à la Justice

 Günther Oettinger (Allemagne), à l’Économie numérique

 Pierre Moscovici (France), commissaire européen aux affaires économiques

 Marianne Thyssen (Belgique), aux Affaires sociales

 Corina Cretu (Roumanie), à la Politique régionale

 Johannes Hahn (Autriche), aux Affaires européennes

 Dimitris Avramopoulos (Grèce), à l’Immigration et aux Affaires intérieures.

 Vytenis Andriukaitis (Lituanie), à la Santé

 Jonathan Hill (Royaume-Uni), au Service financier

 Elzbieta Bienkowska (Pologne), au marché Intérieur

 Miguel Arias Canete (Espagne), commissaire chargé du Climat et de l’Énergie

 Neven Mimica (Croatie), au développement international

 Margrethe Vestager (Danemark), au portefeuille de la concurrence

 Maroš Sefcovic (Slovaquie), aux Transports

 Cecilia Malmstrom (Suède), au portefeuille du Commerce

 Karmenu Vella (Malte), aux Affaires maritimes

 Tibor Navracsics (Hongrie), au portefeuille de la Culture

 Carlos Moedas (Portugal), à la Recherche, la Science et l’Innovation

 Phil Hogan (Irlande), à l’Agriculture

Christos Stylianides (Chypre), aux Aides humanitaires

 

 

merci à http://www.agoravox.fr    /    par remiaufrere (son site)


TAFTA, TPP, ALENA … vers un « Occident » américain contre les pays émergents ?

 

 

vers un Occident américain contre les pays emergents Capture

Sources utilisées :

• « Dossier : Grand marché transatlantique », Le Monde diplomatique, juin 2014.

• Steve Rendall, « TPP—‘The Largest Corporate Power Grab You’ve Never Heard Of’ », Extra!, mars 2014.

• « Bases de l’US Navy dans le monde », DSI, hors série n°33, décembre 2013 – janvier 2014.

• Tanguy Struye de Swielande, « Réaffirmation de la présence américaine en Asie-Pacifique », op. cit.

• « Les États-Unis dans le monde », Diplomatie n°68, mai-juin 2014.

• Elsa Tulmets, « La Politique européenne de voisinage à la recherche d’un nouveau souffle », Questions internationales, n°66, mars-avril 2014.

Pour compléter : le Dossier complet du Monde diplomatique sur le sujet, avec des articles disponibles en intégralité, les archives du journal, des extraits radio, des précédents qui donnent de l’espoir et l’agenda pour prendre part à la lutte.

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L’Empire en construction : Le droit étasunien s’impose sur le territoire européen.

FACTA, Partenariat Transatlantique, SWIFT, passagers aériens…

FATCA

La Belgique et les Etats-Unis viennent de conclure un accord en vue d’appliquer en Belgique, une loi américaine luttant contre la fraude fiscale, le Foreing Account Tax Compliance Act (FACTA). La signature de l’accord a eu lieu ce 23 avril. Plusieurs pays, tel le Royaume-Unis, la France, l’Allemagne et le Japon ont déjà signé avec les USA un accord, appliquant cette loi sur leur sol. A partir du premier janvier 2015, les établissements financiers devront déclarer aux autorités américaines les mouvements d’un compte détenu par un citoyen américain. Dès lors que le montant dépasse les 50.000 dollars ou qu’un certain nombre de mouvements ont lieu avec le territoire américain, la banque doit établir un rapport précis des entrées et sorties de fonds. Si une banque ne se soumet pas à cette procédure, toutes ses activités aux USA seront sur-taxées à hauteur de 30%.  La sanction  peut aller jusqu’au retrait de la licence bancaire aux Etats-Unis.

Ces accords signés par les pays membres de l’UE avec l’administration américaine violent les lois nationales de protection des données personnelles, ainsi que Directive 95/46/CE du Parlement européen et du Conseil, du 24 octobre 1995, « relative à la protection des personnes physiques à l’égard du traitement des données à caractère personnel et à la libre circulation de ces données », directive intégrée dans le droit de tous les Etats membres. L’application de FACTA sur le sol de l’ancien continent  viole le droit national des pays européens, ainsi que le droit de l’UE Ces législations ne sont pas supprimées, mais suspendues. Il convient de ne pas en tenir compte dans les relations avec les Etats-Unis.

De précédents accords légalisant la capture par les autorités américaines des données des ressortissants européens procédaient de même. Depuis les attentats du 11 septembre 2001, Swift, société américaine de droit belge avait transmis clandestinement, au Département du Trésor US, des dizaines de millions de données confidentielles concernant les opérations financières de ses clients. Malgré la violation flagrante des droits, européen et belge, cette capture n’a jamais été remis en cause. Au contraire, l’UE et les USA ont signé plusieurs accords destinés à la légitimer[1].

Swift était soumise au droit belge et à celui de la communauté européenne, du fait de la localisation de son siège social à La Hulpe. Cette société était soumise également au droit américain du fait de la localisation de son second serveur sur le sol des Etats-Unis, permettant ainsi à l’administration US de se saisir directement des données. Ainsi, la société a ainsi choisi de violer le droit européen, afin de se soumettre aux injonctions de l’exécutif américain. Or, depuis fin 2009, les données Swift inter-européennes ne sont plus transférées aux Etats-Unis, mais sur un second serveur européen. Mais, si les américains n’ont plus accès directement aux données, celles-ci leur sont transmises,  à leur demande, en « paquets » et eux seuls maîtrisent techniquement le processus de traitement des informations. De plus, à peine, les accords signés, les américains ont posés de nouvelles exigences. L’administration US avait déjà déclaré en 2009  « que les transactions entre les banques européennes et américaines devraient être captées, sans qu’il y ait une nécessité avérée. »

De même, l’UE ne s’est jamais opposée à la remise des  données PNR par les compagnies aériennes situées son le sol.  Les informations communiquées comprennent les noms, prénom, adresse, numéro de téléphone, date de naissance, nationalité, numéro de passeport, sexe, mais aussi les adresses durant le séjour aux USA, l’itinéraire des déplacements, les contacts à terre, ainsi que des données médicales. Y sont reprises des informations bancaires, tels les modes de paiement, le numéro de la carte de crédit et aussi le comportement alimentaire permettant de révéler les pratiques religieuses. L’initiative unilatérale américaine, de se saisir de ces données, a automatiquement été acceptée par la partie européenne qui a du suspendre ses législations afin de répondre aux exigences d’outre-atlantique[2].

Dans les deux cas, passagers aériens et affaire Swift, la technique est identique. En fait, il ne s’agit pas d’accords juridiques entre deux parties, entre deux puissances formellement souveraines. Il n’existe qu’une seule partie, l’administration US qui, dans les faits, s’adresse directement aux ressortissants européens. Dans les deux textes, le pouvoir exécutif américain réaffirme son droit de disposer de leurs données personnelles et exerce ainsi directement sa souveraineté sur les ressortissants de l’UE.

La primauté du droit étasunien sur le sol européen est aussi un des enjeux des négociations  de la mise en place d’un grand marché transatlantique, le Partenariat transatlantique pour le commerce et l’investissement.(Transatlantic Trade and Investment Partnership).

Grâce au TTIP, les entreprises US pourront, au nom de la libre concurrence, porter plainte contre un Etat qui leur refuse des permis d’exploitation de gaz de schiste ou qui impose des normes alimentaires et des standards sociaux. Ce système de règlement des différends pourrait permettre aux américains de faire tomber des pans entiers de la régulation européenne en créant des précédents juridiques devant cette justice américaine privée. Le principe d’introduire un tel mécanisme a en effet été accepté par les Européens dans le mandat de négociation, délivré à la Commission, en juin 2013, par les ministres du commerce européens.   L’instance privilégiée pour de tels arbitrages est Centre international de règlement des différends liés à l’investissement (Cirdi), un organe dépendant de la Banque Mondiale basé à Washington, dont les juges, des avocats d’affaire ou des professeurs de droit, sont nommés au cas par cas : un arbitre désigné par l’entreprise plaignante, un par l’Etat de Washington, et le troisième par la secrétaire générale du Cirdi[3].

Si cette procédure, partiellement acceptée, entre en jeu dans le cadre du futur grand marché transatlantique, le droit européen s’effacera une fois de plus, ici devant une juridiction privée placée sur le sol américain, dans laquelle la partie étasunienne jouera un rôle déterminant.

Jean-Claude Paye
Jean-Claude Paye, sociologue, auteur de L’emprise de l’image. De Guantanamo à Tarnac, éditions Yves Michel novembre 2011.

[1] Jean-Claude Paye, « Les transactions financières internationales sous contrôle américain, Mondialisation.ca, le 2 mai 2008, http://www.mondialisation.ca/les-transactions-financi-res-internationales-sous-contr-le-am-ricain/8879

[2] Jean-Claude Paye, « L’espace aérien sous contrôle impérial », Mondialisation.ca, le 15 octobre 2007,http://www.mondialisation.ca/l-espace-a-rien-sous-contr-le-imp-rial/7080

[3] Convention pour le réglement des différents relatifs aux investissements entre Etats et ressortissants d’autres Etats, International Centre for Settlement of Investissement Disputes ( ICSID), chapitre de l’arbitragearticle 37, https://icsid.worldbank.org/ICSID/StaticFiles/basicdoc-fra/partA-chap04.htm#s02

Source : http://www.mondialisation.ca/lempire-en-construction-le-droit-etasunien-simpose-sur-le-territoire-europeen/5384195


Entre le ttip et l’identité européenne, il faut choisir

Ce soir [1], nous ouvrons au fond et avec retard puisque la négociation est déjà engagée, le débat sur le TTIP, le projet d’accord commercial transatlantique entre l’UE et les USA. L’opinion européenne, lente à se former, a été prise de court par la diplomatie et par les lobbies. Et ceux-là qui ont réussi leur coup, entendent préserver leur avantage et interdire le débat. Parmi eux, illustration du discours dogmatique néo-libéral, Monsieur Alexander Stubb, Ministre finlandais des affaires européennes et candidat, dit-on, au portefeuille de Commissaire au Commerce, feint de croire que les opposants au TTIP sont forcément contre le capitalisme, la mondialisation, le libre-échange, les Etats-Unis et l’Alliance Atlantique, histoire bien entendu de les discréditer.

 Navré de n’ être rien de tout cela, et tout de même de m’affirmer adversaire résolu du projet d’accord commercial euro-américain.

 Je crois en effet, pour ma part, que la mondialisation est bénéfique parce qu’elle a amorcé une convergence Nord-Sud à partir de la libéralisation du commerce, mais qu’elle exige que ses gains et ses coûts soient équitablement partagés par des mécanismes politiques. Je ne perds pas mon temps à tendre le poing vers le ciel en vilipendant le capitalisme, mais je travaille activement à sa régulation. J’aime l’Amérique à laquelle je dois une part décisive de ma formation d’économiste. Enfin, je suis attaché à l’Alliance Atlantique que je veux paritaire entre USA et Europe.

 Mais avant tout, je suis passionnément et obstinément européen. Je vois l’Europe rassemblée autour d’un modèle social ambitieux et dotée d’une défense commune, condition de son autonomie stratégique au sein de l’OTAN.

 Je soutiens que le TTIP fait dériver l’Europe de sa trajectoire et la place sur une orbite de puissance secondaire, et d’abord parce qu’il la fait renoncer à son modèle social en l’asservissant à la force gravitationnelle du modèle américain qui est légitime, mais différent et éloigné de nos valeurs propres.

 Partons de l’écart qui se creuse aujourd’hui en l’Europe et le citoyen et que précisément le projet de traité transatlantique va encore aggraver. L’UE, longtemps un thème de consensus et de ralliement en Europe est désormais un signe de contradiction. Pourquoi ? Pour deux raisons.

 Au-dedans, l’Eurozone connait une croissance proche de zéro, un chômage structurel élevé, une montée des inégalités et le retour de la pauvreté. L’euro a été provisoirement sauvé, mais en installant une gouvernance biaisée vers la déflation. Au-dehors, l’UE décroche de sa trajectoire de montée en puissance vers un statut d’acteur mondial : son influence décline dans les instances multilatérales (OMC, FMI, Climat) ; elle révèle son impuissance dans la stabilisation de son voisinage propre, car elle n’a pas vu venir le Printemps Arabe, elle a détourné le regard de la tragédie syrienne et n’a pas su protéger l’Ukraine contre Poutine ; enfin elle se divise, par ses réflexes nationaux mercantilistes, face à la Chine et à la Russie et est restée sans voix devant les écoutes de la NSA.

 C’est donc une Europe affaiblie et sur la défensive qui fait ressurgir un vieux serpent de mer : un accord transatlantique de libre-échange qui viendrait doubler l’OTAN. Quelle confusion des genres !

 L’Europe, il est vrai, souffre d’une schizophrénie originelle. Née de la Guerre Froide, elle a confié sa sécurité à l’OTAN et s’est cantonnée dans l’économie. Cette dichotomie interdit la naissance d’une véritable identité européenne, condition d’une véritable démocratie citoyenne. Comment les Européens vont-ils rompre avec cette dualité ? Par la voie de davantage d’Europe en rapatriant au niveau de l’UE le contrôle de la défense commune, ou par une dilution dans un espace atlantique qui outre la stratégie engloberait aussi l’économie. Identité européenne ou appartenance atlantique ? Entre le TTIP et l’Europe il faut choisir ! C’est le véritable sujet de notre forum de ce soir.

Aujourd’hui, USA et UE sortent difficilement de la crise financière de 2007-2008 dont ils sont solidairement responsables, car c’est leur choix de la dérégulation financière qui a en définitive conduit à une décennie perdue pour la croissance et l’emploi. Cette crise a fait grand tort à l’économie mondiale, à commencer par les économies émergentes. Elle a aussi discrédité en profondeur le magistère intellectuel occidental.

 Face à cette panne de leur système, USA et UE ont résolu de chercher la croissance, chacun sur le marché de l’autre, alors que ses ressorts sont dans la demande intérieure inhibée par le surendettement. L’intégration commerciale des deux géants en déclin relatif est le terme logique de la « libéralisation compétitive » inaugurée par Washington à partir de 2003 pour contourner les blocages au sein de l’OMC, par une série d’accords bilatéraux de libre-échange conclus tous azimuts dans un rapport « du fort au faible », caractéristique de ces accords. L’UE s’est engagée, depuis 2006, sur les traces des USA dans cette course au bilatéralisme. Avec le TTIP elle bouclerait la chaîne de ces accords en revenant à la tentative avortée d’un New Transatlantic Market Place (1998) de Sir Leon Brittan dès 1995. Jusque-ici cet essai n’avait abouti qu’à des accords formels sans contenu, le Transatlantic Economic Parntership (TEP) et le Transatlantic Economic Council et quelques arrangements techniques de reconnaissance mutuelle.

 En 2012, l’affaire est remise en chantier au travers d’une étude commune. Et cette fois, elle aboutit à une décision de principe unanime du Conseil Européen qui a conduit à l’attribution d’un mandat de négociation à la Commission par le Conseil des Ministres, avec l’appui d’une large majorité au Parlement Européen, sans Ecolo il est vrai.

Qu’est-ce que le TTIP ? Comment en est-on arrivé là ? Pourquoi cette fois l’unanimité ? Quelles objections lui apposer ?

1. Qu’est-ce que le TTIP ?

Ce n’est pas une simple zone de libre-échange. Karel De Gucht, le Commissaire au Commerce, parle d’un « marché intérieur transatlantique ». Il s’agit d’abord de supprimer – presque – tous les tarifs douaniers subsistants. Ceux-ci sont bas en moyenne – de 2 à 2,5% – mais comportent encore des pics tarifaires dissuasifs. Ensuite, le TTIP diminuerait de 25% les obstacles non tarifaires aux échanges, notamment en matière de services, d’investissements, d’accès aux marchés publics des Etats fédérés et des villes. Il organiserait aussi la convergence règlementaire par harmonisation ou reconnaissance mutuelle en matière de normes et de standards, propriété intellectuelle, etc. Enfin, il instaurerait une instance d’arbitrage privée ouverte aux entreprises contre les Etats, qui pourrait condamner ceux-ci à modifier leurs législations ou à acquitter des dommages-intérêts.

 Si ce projet est intégralement réalisé, ce qui pourrait prendre dix ans, il en résulterait, selon une étude du CEPR commanditée par la Commission, une croissance additionnelle de 0,5% du PIB de l’UE. Celle-ci se traduirait en 500 euros de gain de pouvoir d’achat par ménage européen et par un relèvement des salaires qualifiés et non qualifiés de 0,5%. Des chiffres sont avancés sur l’emploi, mais les services de la Commission qui ont fait un excellent commentaire de l’étude CEPR, s’abstiennent avec raison de les corroborer.

 Les uns diront que 0,5% de croissance est bon à prendre par les temps de disette qui s’annoncent. Les autres diront, plus sceptiques quant à la valeur des projections par des modèles d’équilibre général : tout ça, pour ça ? Tous sont d’accord pour admettre que le TTIP ne sera au mieux, réalisé qu’en partie, aux trois quarts ou aux deux tiers des objectif affichés avec dès lors un moindre impact sur la croissance. Nombreux sont ceux, parmi eux des négociateurs expérimentés, qui disent leur scepticisme devant l’écart entre la complexité de l’entreprise et la faiblesse de l’adhésion populaire. En particulier du côté américain, les syndicats échaudés par le précédent décevant de l’ALENA (l’accord de libre-échange avec le Canada et le Mexique) en matière de création d’emplois, affichent leurs réticences.

2. Pourquoi l’unanimité des institutions de l’UE en faveur du TTIP ?

On se retrouve devant un alignement de préoccupations convergentes :

  1. la Commission recherche désespérément dans les exportations un moteur de croissance alternatif à l’austérité budgétaire et à la dévaluation interne dans lesquelles végète l’eurozone
  2. elle a pour alliés le Royaume-Uni, acquis d’avance à « la relation spéciale » et poussé par la City, et dorénavant l’Allemagne et ses voisins (Pays-Bas, Autriche, Suède, Finlande) avantagés par leur bonne spécialisation économique, qui se voient en remorqueurs de la croissance de l’eurozone via les exportations extra-européennes. Le statut dominant acquis par l’Allemagne dans le sauvetage de l’euro, interdit désormais à ses partenaires d’ignorer ses intérêts. Ceux-ci – l’automobile et le secteur de l’équipement – sont influents en Allemagne, industriels et syndicats confondus. Les Etats périphériques et la France s’inclinent faute d’alternative du côté d’une croissance interne.
  3. les lobbies (milieux d’affaires, consultants, bureaux d’avocats) sont puissants et bien organisés du côté américain et européen ; le côté européen comprend de gros intérêts américains localisés en Europe et parfois conseillés par d’anciens Commissaires ou hauts fonctionnaires européens.
  4. et puis il y a l’inquiétude stratégique du côté d’une UE désunie, de voir l’Amérique d’Obama se détourner du Vieux Continent et de se focaliser sur l’Asie, à la fois espace en croissance et zone d’instabilité stratégique potentielle
  5. enfin, aux Etats-Unis justement, certains pensent aussi à une stratégie « en pince » visant à prendre la Chine en étau : d’un côté le partenariat commercial transpacifique (TPP) et de l’autre le partenariat transatlantique (TTIP). Cette approche mêle deux niveaux de préoccupations : les uns – européens et américains – en restent au domaine commercial et voient une coalition atlantique, forte de ses 43% du PIB mondial et de ses 31% du commerce de marchandises, dicter les normes et les standards règlementaires à la Chine pour forcer l’entrée dans son marché intérieur ; d’autres, du côté américain où l’on reste partagés sur la politique à suivre, pensent à une vraie stratégie d’endiguement de la Chine en vue de peser sur sa croissance économique de manière à freiner sa montée en puissance stratégique. L’EU incompétente en ces matières et en tout état de cause divisée, n’a pas d’opinion sur la question. Elle se laisse ici instrumentaliser. Du coup, elle compromet ainsi son crédit international. Elle apparait comme n’ayant pas d’intérêts propres, distincts des intérêts américains, face à l’enjeu majeur de notre temps, l’intégration de la Chine.

3.Quelles critiques adresser au TTIP ?

Distinguons ce qui concerne les protagonistes et ce qui touche aussi le reste du monde.

a. Le TTIP et les deux protagonistes

 l’argument principal de la Commission est celui de la croissance (0,5%) et de l’emploi (non chiffré). Pour apprécier la réalité escomptée du gain, il faut savoir que le potentiel de croissance lié aux échanges transatlantiques est déjà largement réalisé par l’intensité des échanges actuels et par le niveau très élevé des investissements croisés qui supportent plusieurs millions d’emplois de chaque côté de l’Atlantique. On subodore immédiatement que plutôt qu’un gain significatif de croissance, le TTIP provoquera une redistribution des gains de libéralisation entre pays et entre secteurs, non seulement entre UE et USA, mais entre Etats-membres de l’UE.

  1. Le calcul de 0,5% appelle trois commentaires : d’abord la projection est fragile parce que si sur le long terme, libéralisation des échanges et croissance vont de pair, le lien de causalité est équivoque. Une très grande économie peu dépendante de ses exportations (13,4% du PIB pour l’UE-28) gagnera moins qu’une petite économie, à la libéralisation réciproque. De plus si elle est en sous-emploi, ce qui est le cas aujourd’hui, les bénéfices seront moindres encore. Ensuite, cette croissance nette au niveau de l’UE se traduira par des divergences entre Etats-membres, qui viendront renforcer le problème clé de l’Eurozone, celui des écarts de performance entre cœur et périphérie. Enfin et surtout, si la libéralisation a toujours une vertu « transformatrice » qui relève la productivité sur le long terme, elle n’offre pas une alternative significative à une relance de la demande intérieure pour l’eurozone qui passe par une mutualisation et une restructuration de la dette souveraine et une restructuration du secteur bancaire.
  2. la négociation sera asymétrique entre une Amérique intégrée, unie et puissante, et une UE-28 hétérogène dépourvue d’un mécanisme de redistribution interne des gains et des coûts de la libéralisation entre Etats-membres et surtout avec un marché intérieur inachevé dans des secteurs critiques, notamment des services : énergie, télécommunications, numérique, services financiers, industries de défense.
  3. la convergence règlementaire, raison d’être principale du TTIP, pose question car les normes et standards diffèrent des tarifs sur un point capital. Avant d’être des obstacles aux échanges, ils sont des outils de protection pour les consommateurs, les travailleurs, les épargnants, etc. La normalisation financière, sanitaire, sociale, environnementale et en matière de protection des données privées et des libertés répond en effet à des valeurs sociétales et culturelles profondes qui vont bien au-delà des considérations d’économies d’échelle pour les entreprises. La convergence règlementaire transatlantique se heurtera donc aux différences de préférences collectives notamment en regard du principe de précaution sanitaire et environnemental (OGM, hormones, poulets chloridés), et par rapport au degré de préférence pour l’égalité et la solidarité qui en découle. Elle achoppera aussi sur les modes de faire respectifs des deux côtés de l’Atlantique : la règlementation ex-ante versus contentieux ex-post, la multiplicité des agences autonomes et des niveaux de pouvoirs, et last but not least, l’emprise des lobbies américains sur les régulateurs et sur le Congrès.
  4. l’ISDS, c’est-à-dire le recours à l’arbitrage international privé, ne se justifie pas entre deux partenaires comme les USA et l’UE dotés chacun d’un bon système légal et d’une justice indépendante. La clause arbitrale est un expédient pour traiter avec les Etats où la règle de droit ne fonctionne pas. Elle n’a pas sa place dans la relation transatlantique sauf à considérer que nos systèmes judiciaires respectifs ne fonctionnent pas non plus au-dedans. Il faut alors les réformer pour tous les investisseurs, domestiques et étrangers.
  5. Plus important néanmoins, comment concilie-t-on, dans ce « marché intérieur transatlantique », concurrence commerciale loyale et rivalité entre monnaies internationales – le dollar et l’euro – dont l’une est sujette à une dépréciation voulue et l’autre est condamnée à s’ajuster ?
  6. Comment assurer cette même concurrence loyale dans les secteurs à haute intensité énergétique (acier, aluminium, chimie, transports) entre deux partenaires, dont les politiques énergétiques et climatiques divergent sur des aspects fondamentaux, notamment le gaz de schiste ?
  7. Quant aux PME, censées avoir accès au marché américain comme à n’importe quel marché national dans l’UE, elles seront aussi davantage exposées aux menaces de prises de contrôle : l’actionnariat familial et stable n’est pas la culture dominante chez le fonds de pensions américains.

B. Impact sur le reste du monde

 Au-delà de ces considérations qui ne touchent que les Etats-Unis et l’Europe, il nous faut élargir notre horizon et considérer le monde. Les objections se font plus sévères encore.

  1. D’abord le TTIP n’est pas dans l’esprit de l’OMC. Il mine en effet sérieusement le multilatéralisme dont USA et UE devraient être les piliers et les garants. L’article XXIV du GATT permet une exception au principe de non-discrimination entre Membres pour des zones de libre-échange. Mais il n’a pas été conçu pour construire une « coalition de convergence règlementaire » des deux plus grandes puissances commerciales – sur le déclin – pour dicter leurs normes et standards aux autres Membres.
  2. Ensuite il est évident que les USA, pivot unique des accords transpacifique et transatlantique, s’attribuent une position dominante dans l’élaboration des standards et normes à vocation pluri-ou multilatérale.
  3. Enfin, a-t-on réfléchi à la possibilité d’une riposte chinoise qui ruinerait le scénario de la « cornérisation » de la Chine par le TTIP et le TPP ? La Chine va en effet miser de plus en plus sur son marché intérieur pour poursuivre son escalade technologique, clé de sa sortie par le haut de la « trappe du pays à revenu moyen ». Or la Chine en 2001, a dû, sous la pression conjuguée de l’UE et des USA, baisser drastiquement ses tarifs douaniers sur les marchandises au titre de son ticket d’entrée dans l’OMC. Croit-on qu’elle va se laisser priver de sa deuxième ligne de défense, notamment dans les industries et services de haute technologie – en particulier le numérique – que constituent les barrières règlementaires ? Est-on sûr que la Chine n’est pas en mesure d’organiser à son tour une contre-coalition règlementaire avec ses voisins, fournisseurs et clients ? Ceux qui ont lancé inconsidérément la négociation du TTIP ne sont-ils pas en train de déclencher une confrontation de blocs commerciaux. C’est le risque couru dès que l’on déserte le champ du multilatéralisme.

 

4. conclusion

L’affaire du grand marché transatlantique est singulière à plusieurs égards. Quant au consensus de départ du côté des Etats-membres et du Parlement – Ecolo, je le répète volontiers n’en était pas – il évoque la parabole des aveugles si éloquemment illustrée par Bruegel : conduits par l’un d’entre eux, ils tombent dans le fossé.

D’abord, comment l’Europe prendrait-elle le risque de jouer son identité-même, en asservissant son modèle à une culture politique très différente de la nôtre, quand bien nous partageons des principes politiques et économiques communs et une alliance stratégique comme l’OTAN ? Font-ils vraiment confiance à l’Europe, ceux qui ne lui voient d’avenir que dans un carcan atlantique face à l’émergence d’un monde multipolaire ? Pour ma part, je redis : Alliance atlantique, oui, mais avec la parité UE-USA parce que nous sommes différents !

Ensuite, pourquoi l’Europe n’a-t-elle pas encore pris comme UE toute la mesure de son potentiel propre de puissance stratégique et la responsabilité qui y est attachée vis-à-vis du reste du monde. Le rôle de l’Europe est d’explorer et de proposer aux autres pays un modèle de développement équitable et soutenable dans le nouveau contexte de la mondialisation et des contraintes sur les ressources et sur le climat. Elle doit faire rayonner cette idée dans le monde comme elle l’a fait au fil de son Histoire avec la civilisation gréco-romaine, le Christianisme et les Lumières. Pour cela, elle a besoin de définir librement son modèle et l’articuler sur une réindustrialisation fondée sur l’innovation, sur la sobriété dans l’usage des ressources, sur le partage équitable de la valeur ajoutée et sur la constitution de champions européens industriels et financiers intégrés et soumis à une fiscalité et à un droit des sociétés harmonisés. Mais elle doit aussi appuyer son « soft power » sur un « hard power » dont elle aurait la maitrise politique. Le modèle ne va en effet pas longtemps sans la puissance. Le « consensus de Washington » qui a été dicté au monde – y compris l’Europe – par les néolibéraux anglo-saxons, aurait-il pu s’imposer s’il n’y avait pas eu, derrière, la formidable puissance stratégique des Etats-Unis ?

Enfin, reste la suite et fin du projet TTIP. La négociation mourra-t-elle dans les sables mouvants du Congrès Américain où lobbies et syndicats se neutralisent ? Accouchera-t-elle, comme la montagne, d’une souris que l’on baptisera hâtivement « récolte précoce » avant d’en rester là ? Le nouveau Parlement auquel reviendra le dernier mot avec la ratification, aura-t-il le front de défier un Conseil européen unanime qui se serait engagé sur un compromis ? Se cachera-t-il derrière des aménagements et des exceptions pour accepter le gros du TTIP sans avoir saisi la portée politique du renoncement qu’il constitue au modèle européen ? Les futurs élus seraient bien avisés de ne pas attendre l’épilogue final pour rouvrir un débat de fond sur la faisabilité et la compatibilité du TTIP avec le projet européen ! Le plus tôt sera le mieux.

[1] Intervention au forum étopia du 7 mai 2014

Source : http://www.etopia.be/spip.php?article2715

 


Quelques éléments trop peu connus du néolibéralisme

1er avril par Roger Goddin

Beaucoup avaient espéré, lorsque survint la crise des subprimes en 2007-2008, que le néolibéralisme vivait son chant du cygne ; que l’intervention en panique des États pour sauver les banques marquait le retour de Keynes à l’avant-scène du théâtre capitaliste. Il n’en est rien : imperturbable, le bulldozer néolibéral poursuit son cheminement, et il faut encore et encore améliorer la connaissance de ce système en vue de pouvoir un jour lui asséner le coup fatal que ses méfaits lui ont valu de longue date. Le texte qui suit vise à attirer l’attention sur quelques éléments trop souvent oubliés ou minimisés dans bon nombre de textes relatifs au néolibéralisme. D’abord l’existence et l’importance de l’ordolibéralisme, courant d’avant-garde du néolibéralisme ; puis un petit abrégé de quelques éléments de la pensée de Friedrich Hayek, le « pape » du néolibéralisme ; enfin la prise en compte du fait que le néolibéralisme, ce n’est pas qu’un catalogue de mesures macro-économiques : c’est aussi un mécanisme qui influence grandement le mode de penser et d’agir des individus – sur les lieux de travail mais aussi dans la vie privée.

Beaucoup avaient espéré, lorsque survint la crise des subprimes en 2007-2008, que le néolibéralisme vivait son chant du cygne ; que l’intervention en panique des États pour sauver les banques marquait le retour de Keynes à l’avant-scène du théâtre capitaliste. Il n’en est rien : imperturbable, le bulldozer néolibéral poursuit son cheminement, et il faut encore et encore améliorer la connaissance de ce système en vue de pouvoir un jour lui asséner le coup fatal que ses méfaits lui ont valu de longue date. Le texte qui suit vise à attirer l’attention sur quelques éléments trop souvent oubliés ou minimisés dans bon nombre de textes relatifs au néolibéralisme. D’abord l’existence et l’importance de l’ordolibéralisme, courant d’avant-garde du néolibéralisme ; puis un petit abrégé de quelques éléments de la pensée de Friedrich Hayek, le « pape » du néolibéralisme ; enfin la prise en compte du fait que le néolibéralisme, ce n’est pas qu’un catalogue de mesures macro-économiques : c’est aussi un mécanisme qui influence grandement le mode de penser et d’agir des individus – sur les lieux de travail mais aussi dans la vie privée.


1. L’ordolibéralisme ouvre la voie au néolibéralisme

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Occupy life, occuper la vie, occupare la vita / Sergio Girardi

« Le sujet idéal du totalitarisme, ce n’est pas le nazi convaincu ou le communiste convaincu ; ce sont plutôt les gens pour lesquels la distinction entre fait et fiction (c’est-à-dire la réalité de l’expérience) n’existe plus. »

Hannah Arendt, Les origines du totalitarisme, 1958

Au-delà du totalitarisme de la démocratie spectaculaire

Quiconque se pose la question sociale dans ses termes radicaux, assume immédiatement la lourde tâche de libérer les mots et les concepts qui en composent la trame contemporaine du sens téléguidé et falsifiant qu’une pseudo-culture spectaculaire, omniprésente, leur colle dessus.
Cela reste vrai qu’en l’absence d’une révolution la culture dominante est toujours la culture de la classe dominante ; même aujourd’hui quand, allant bien au-delà des intérêts d’une classe particulière, la domination s’est infiltrée parmi les castes humiliées et confuses d’un capitalisme anthropomorphisé pour y diffuser le spectacle qui, toutes classes confondues, éduque les hommes capitalisés à la domestication.

Les dérives du signifiant des termes fondamentaux qui composent l’histoire des doctrines politiques et de leurs mutations tendent systématiquement à fausser le sens des passions qui les articulent et les projets sociaux dans lesquels ces doctrines sont inscrites. Cela est vrai depuis toujours, mais encore plus aujourd’hui quand presque tout s’exprime sur la scène d’une société du spectacle en pleine décadence.
Le poids de l’idéologie nous accompagne toujours pour nous pousser inéluctablement vers les territoires administrés par l’ennemi, là où plusieurs mots fondamentaux sont employés de façon acritique selon le système des valeurs de l’idéologie dominante, désormais étendue à tout l’univers politique de la société spectaculaire : de droite à gauche, des Parlements et de l’Etat aux Bourses et au Marché, du réformisme pragmatique au révolutionnarisme abstrait.

A ce propos, j’ai repéré dans le livre de Nico Berti, Liberté sans révolution, un exemple évident de la difficulté rencontrée par la pensée critique radicale (en dehors, donc, des élucubrations académiciennes et de la mauvaise foi des mercenaires de la culture) à se soustraire au « bon sens » conformiste qui écrit ses théorèmes en utilisant des mots lourdement idéologisés.
En suivant une mode sectaire plutôt fréquente parmi les anarchistes antimarxistes (justifiée seulement en partie par l’odieux autoritarisme idéologique des théologiens marxistes-léninistes), un Berti « libéral-libertaire »1 identifie platement le projet communiste au soi disant communisme réel ; alors que, en revanche, avec une facilité déconcertante chez un libertaire, il octroie le label de qualité démocratique à la démocratie virtuelle et fictive qui est, depuis des siècles, la forme la plus haute et la plus efficace de la domination du capitalisme et de ses serviteurs volontaires sur la dernière classe de l’histoire, la classe de la conscience.
Identifier simplement l’alternative entre démocratie et totalitarisme, sans prendre en compte le glissement sémantique contrôlé que je viens de dénoncer, pousse à ignorer le distinguo nécessaire entre la démocratie fictive existante (parlementaire, majoritaire et hiérarchique) et la démocratie réelle incluse dans le projet révolutionnaire de l’autogestion généralisée de la vie quotidienne.

Pour un libertaire – et j’assume pleinement pour moi ce qualificatif -, l’alternative radicale ne se pose pas entre démocratie et totalitarisme, mais bien avant et plus profondément, entre une démocratie réelle, inexistante, et la démocratie spectaculaire, répandue comme une représentation idéologique du totalitarisme affiné de la société du spectacle.
On n’a pas besoin de ressortir l’anarchie pour dénoncer le totalitarisme dans ses formes ringardes, traditionnelles. L’antifascisme a uni dans un premier interclassisme aussi inévitable qu’ambigu, athées et croyants, bourgeois et prolétaires, libéraux et communistes, libertaires et autoritaires non totalitaires dans une lutte contre « la bête immonde » achevée par l’instauration des démocraties parlementaires de la deuxième moitié du vingtième siècle, devenues en l’espace de quelques décennies, le pire produit du fascisme, finalement vaincu uniquement dans sa forme politique archaïque.

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L’Union européenne ouvre la Sécurité Sociale à la concurrence

Privatiser la sécurité sociale : un vieux rêve de la Commission européenne.  LA RÉGLEMENTATION SUR LES MARCHÉS PUBLICS CONCERNE LES SERVICES DE PROTECTION SOCIALE

L’adoption par le Parlement européen, le 15 janvier, de la nouvelle législation européenne sur les marchés publics et les contrats de concession Lire la suite »


Gaz de schiste : l’Europe démissionne ! Qu’en sera-t-il, alors, quand le TAFTA viendra ?

Un article de ReporTerre et un du Monde

***ReporTerre

La Commission européenne ne veut pas réglementer l’exploitation du gaz de schiste. Plutôt que de proposer un cadre réglementaire aux États, elle se contentera de proposer le 22 janvier de simples « recommandations ». Lire la suite »


Centre International de Règlement des Différends liés à l’Investissement : la Bolivie, l’Équateur et le Venezuela en sont partis

Que penser du Centre International de Règlement des Différends liés à l’Investissement, le CIRDI ? Lire la suite »


Comment sauver l’euro / Joseph E. Stiglitz

NEW YORK – Il y a trois ans éclatait la crise de l’euro et il faut être un optimiste invétéré pour croire que le pire est passé. Lire la suite »


La crise cinq ans après : le verre est aux trois quart vide / Joseph E. Stiglitz

NEW-YORK – En 2008, lorsque la banque d’investissement Lehman Brothers a fait faillite, déclenchant la pire crise financière mondiale depuis la Grande dépression, les causes en étaient évidentes aux yeux de la majorité des observateurs. Un systéme financier démesuré et dysfonctionnel avait mal réparti le capital, et plutôt que de gérer les risques, ils les avaient engendrés. La déréglementation financière et l’argent facile avaient suscité des prises de risque inconsidérées. La politique monétaire à elle seule allait se révéler insuffisante pour relancer l’économie Lire la suite »


Le Grand malaise des pays avancés / Joseph E. Stiglitz

NEW YORK – Il y a quelque chose d’affligeant à faire un bilan de fin d’année cinq ans après la crise financière mondiale de 2008. Lire la suite »


L’Europe, terrain de lutte pour lever l’envoûtement néolibéral

Ceux qui comme nous ne font pas dans l’électoralisme sont les mieux placés pour mesurer l’importance des élections de 2014 au Parlement européen. On peut facilement prédire Lire la suite »